Reportage

REPORTAGE
L’immobilier languedocien se déconfine

Après deux mois passés sous cloche, les transactions repartent fort. Simple effet de rattrapage ? Pas seulement. Avec des taux d’intérêt toujours bas, et une envie de nouveaux produits, plus éloignés des centres urbains, le marché immobilier régional a de vrais attraits. Tour d’horizon.

 

Un grand besoin d’air

Dans le Gard, « la demande repart à la hausse au-delà de Nîmes, sur des secteurs plus éloignés, à Saint-Chaptes, La Calmette ou Bellegarde », explique Jérémy Kot, directeur de l’agence GGL (aménagement) de Nîmes.

La généralisation du télétravail donne des idées à de nombreux ménages. pourquoi ne pas se mettre au vert, en faisant passer le cadre de vie avant la proximité avec le lieu de travail ? « Les nouvelles façons de travailler vont avoir un impact, à terme, sur le marché immobilier », anticipe Jérémy Kot. Une tendance confirmée par Francis Lafon, président du comité des banques FBF de l’Hérault. « De plus en plus de Parisiens ou de Lyonnais appellent, avec l’idée de s’installer au soleil en famille, et de se rendre au siège de leur entreprise deux ou trois jours par semaine, en télétravaillant le reste du temps. Ce phénomène peut être un facteur de maintien des prix, voire de la poursuite de leur augmentation. »

Sur le marché local aussi, des mouvements s’amorcent. « Nous n’avons jamais autant reçu de préavis de départ de locataires d’appartements en centre-ville, à Béziers, Narbonne, Perpignan…, qui recherchent des locations à l’extérieur », relève Bertrand Malquier. Une tendance à surveiller de près : les centres-villes vont-ils perdre en attractivité ? 

Des taux d’intérêt toujours bas

  « Depuis trois semaines, de nouveaux dossiers de crédits immobiliers arrivent, observe Francis Lafon. Les taux d’intérêt ont finalement peu augmenté. » L’agence immobilière Tandem Immobilier (Montferrier-sur-Lez) fait état d’un client qui a obtenu un taux de 1,1 % pour un prêt sur 25 ans. Un autre élément qui joue en faveur des consommateurs : la concurrence entre les banques. « Elles n’ont pas le même niveau d’activité d’avant la crise. Chacun défend son fonds de commerce », analyse Francis Lafon.

Par ailleurs, l’immobilier régional reste très attractif, « avec des prix très bas par rapport à ceux de la Côte-d’Azur ou de la Nouvelle-Aquitaine », observe Bertrand Malquier, nouveau président de la Fnaim Languedoc-Roussillon. Mais les conditions d’attribution des crédits se sont durcies au niveau national, avec une limite stricte d’un tiers des revenus des ménages.


Le moment de vendre

« Pour les vendeurs, c’est le bon moment pour signer, estime Nathalie Billey (Tandem Immobilier). La casse économique qui se profile pour les prochains mois n’est pas encore survenue. Aujourd’hui, avec le déconfinement encore récent, on sent une euphorie, jusqu’à dans l’attitude des gens. Je ne suis pas sûre que le même état d’esprit règne à la rentrée. »

Dans le nord de Montpellier, marqué par « un manque d’offres » et une clientèle huppée (cadres supérieurs, professionnels de santé, chefs d’entreprises, retraités), les prix se maintiennent à un haut niveau. Avec de belles transactions, signées rapidement et sans négociation : 675.000 euros pour une maison familiale à Montferrier-sur-Lez, ou 560.000 euros pour une villa à Clapiers, avec des travaux à effectuer, sur une parcelle arborée de 1.500 m2.


De nouveaux dispositifs de défiscalisation ?

 On le sait : la première des industries est, dans notre région, le bâtiment. La filière redoute une vague de faillites. Les mauvais signaux s’amoncellent : deux mois d’arrêt, ralentissement des ventes de logements neufs, difficultés d’approvisionnements en matériaux, surcoûts liés aux mesures sanitaires à mettre en place sur les chantiers, et un essoufflement de la commande publique avec le report du 2e tour des élections municipales. La filière pousse pour renforcer les dispositifs de défiscalisation sur les produits immobiliers, afin de relancer la demande. « La loi Scellier de 2009 était bien plus incitative que l’actuel dispositif Pinel. Il faut aussi relancer le PTZ pour les primo-accédants », souligne Karen Winkler, directrice générale de Habitec (promotion immobilière, Nîmes).


« Les prix devraient baisser à Montpellier » Selon Norbart Bachevalier, Président de la FNAIM de l'Hérault

« La crise économique à venir devrait faire baisser les prix à Montpellier. À Port-Marianne, on peut atteindre 5.800 €/m2, dans des immeubles de près de 10 ans. Ce n’est pas raisonnable. Une décote devrait s’opérer sur ces valeurs bien trop élevées. D’autant plus qu’il y a des contraintes spécifiques, avec des impôts locaux et des charges de copropriété élevés. Et les conditions d’octroi des crédits se sont durcies : 30 à 40 % de dossiers finançables en 2018 ou 2019, ne le sont plus aujourd’hui. »